HORIZON 1993
Le travail à temps partiel plus développé au Royaume-Uni qu'en France*
Des emplois "flexibles" et nombreux, surtout destinés aux femmes mariées
par
Marie-Agnès
Barrère-
Maurisson,
Anne-Marie
Daune-
Richard,
Marie-Thérèse
Letablier**
* Ce travail prolonge une recherche financée par le programme franco-britannique du CNRS et IESRC (Economie and Social Research Council), à laquelle ont participé : côté français, outre les auteurs de cet article, Margaret Maruani, Danièle Lin- hart et Agnès Pivot (CNRS) ; côté britannique, Veronica Beechey (Open University), Elisabeth Garnsey (Cambridge), Hilary Land (Bristol), Ceridwen Roberts (Department of Employment) et Mandy Wright.
** Marie-Agnès Barrè- re-Maiirisson appartient au CNRS (Séminaire d'Economie du Travail) ; Anne-Marie Dau- ne-Richard appartient au CNRS (Laboratoire d 'Economie et de Sociologie du Travail) ; Marie-Tfiérèse Letablier appartient au Centre d'Etudes de l'Emploi.
Les nombres entre crochets renvoient à la bibliographie en fin d'article.
Presque une femme salariée sur deux travaille à temps partiel au Royaume-Uni, contre seulement une sur cinq en France. Parmi les non salariées aussi, le travail à temps partiel est plus développé outre-Manche.
Au Royaume-Uni, les stratégies individuelles et les stratégies patronales convergent pour renforcer la pratique du temps partiel par les femmes. Souhaité par les employeurs pour rendre le travail plus flexible, le temps partiel est également facilité par la législation, puisqufen deçà d'un certain seuil de revenu, ni le salarié ni son employeur n 'ont à payer de charges sociales. En contrepartie, ces salariés ne bénéficient d'aucune couverture sociale. Pourtant, le travail à temps partiel ne semble pas réellement contesté par les syndicats anglais, car il offre de nombreuses perspectives de travail aux femmes, surtout si elles sont mariées. Dans un pays où les crèches et les écoles maternelles sont peu développées et l'aide spécifique à la famille peu importante, le temps partiel est la principale solution permettant de concilier une activité et des charges familiales. D'ailleurs, outre-Manche, quand une femme élève au moins un enfant et qu'elle travaille 9 dans plus de sept cas sur dix, c'est à temps partiel. Ainsi, le temps partiel semble constituer pour les femmes britanniques plus que pour les Françaises une alternative au chômage.
Au Royaume-Uni comme en France, le travail à temps partiel est un phénomène spécifiquement féminin. Mais presque une femme salariée sur deux est concernée par le travail à temps partiel au Royaume-Uni, contre seulement une sur cinq en France (tableau 1). Parmi les non salariées aussi, le travail à temps partiel est plus développé outre- Manche : près de la moitié des femmes non salariées du Royaume-Uni travaillent à temps partiel, contre seulement un peu plus d'une sur quatre en France.
La durée moyenne du travail à temps partiel est nettement plus longue en France : 21 , 1 heures hebdomadaires contre 17,8 heures au Royaume-Uni. En France, 42 % des femmes salariées à temps partiel effectuent plus d'un mi-temps (c'est-à-dire au moins
2 1 heures par semaine) ; elles sont seulement 34 % au Royaume-Uni (tableau 2).
De plus, la tendance récente en France va encore dans le sens d'un accroissement des durées longues de temps partiel ; en particulier, le nombre de femmes effectuant plus de 30 heures hebdomadaires continue d'augmenter. Les aménagements récents du travail à temps partiel dans le secteur public peuvent expliquer le développement des temps partiels longs en France. Au Royaume-Uni, le secteur public est à la fois moins développé et moins favorable au temps partiel.
A l'inverse, les temps partiels courts (moins de dix heures hebdomadaires) sont beaucoup plus fréquents au Royaume-Uni qu'en France où ils ne sont
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Économie et Statistique n° 220, avril 1989
