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Un acteur à l’idéologie titubante | Next
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Un acteur à l’idéologie titubante

(Mis à jour: )
Par ERIC LORET

De Mitterrand à Sarkozy en passant par Castro et Khalifa, Depardieu n’a jamais cessé de retourner sa veste.

Gérard Depardieu, le 1er octobre 2012 à Berlin. - Photo Johannes Eisele. AFP

C’est Marguerite Duras qui offre à Gérard Depardieu sa première apparition au cinéma, dans Nathalie Granger, en 1972. Cinq ans plus tard, alors qu’elle est bourrée H24, la pythie de Neauphle lui donne le premier rôle du Camion et note dans un coin de sa tête, si l’on en croit Laure Adler, «Depardieu sait pas lire, pas écrire ! C’est un analphabète, tout le monde le sait !» En 1994, dans une interview sur France 3, évoquant une enfance à l’état «brut», il avoue d’ailleurs que les mots «lui manquent encore toujours beaucoup». Un peu plus tard, il se pète le nez dans une baignoire en Géorgie et le sculpteur animalier Bernard de Souzy fait de lui un bronze de 300 kilos intitulé la Force aveugle.

La littérature, l’alcool et l’imbécillité de tout génie, voilà sans doute l’élément négligé dans la saga Depardieu. Sublime, forcément sublime, a-t-on envie d’ajouter (d’autres préfèrent l’antienne «Il est vraiment phénoménaaaaaal») en découvrant la dernière déclaration de Gégé(lire ci-contre). On se dit à ce stade que les mots ont perdu tout référent réel, qu’ils forment des fantômes et qu’on est entré dans la fiction. «Je lui ai dit…» scande Depardieu. Sans doute croit-il à la parole performative, celle où l’action est le verbe même, généralement réservée à Dieu et ses ministres. Il suffirait de dire «la Russie est une démocratie» et hop, ce serait vrai.

On s’étonne parfois que Depardieu soit passé de Mitterrand à Sarkozy sans ciller. Or, ce sont moins des idéologies, des théories politiques qu’a pu soutenir l’acteur au long de sa carrière, qu’une certaine idée de la puissance, du désir, de la vigueur.

Grammes. En 1987, il achète (après le chanteur Renaud) une page de pub dans le Parisien avec le slogan «Mitterrand ou jamais». Sortant de son anarchisme, il écrit : «Ça y est, je vais voter pour la première fois.» Dix ans plus tard, on le voit au côté de Chirac en voyage officiel en Roumanie, au moment des lois Debré qui visent à favoriser la délation anti-immigration. Il descend de l’avion bras dessus, bras dessous avec le ministre de l’Intérieur et, avec on ne sait combien de grammes dans le sang, gueule : «Je suis venu avec mon ami, M. Debré.» En 1999, il se déclare contre les 35 heures. Côté socialiste, il préfère en effet Georges Frêche, au secours duquel il vole en 2010 et qu’il trouve «bien plus vrai et bien plus sympathique que Martine Aubry et compagnie !»

Mais politique, gros sous et spectacle sont désormais liés. En 1996, Depardieu a investi dans la société pétrolière de Gérard Bourgoin à Cuba et bu un coup avec Castro. Deux ans plus tard, il soutient le candidat nationaliste Vladimir Mečiar en Slovaquie - pour moins de 50 000 euros, semble-t-il - un prix d’ami. En 2002, il se paie une pub dans Libé pour cautionner le milliardaire algérien Rafik Khalifa, soupçonné d’abus de biens sociaux et de blanchiment. Réactions vives au sein de Libé. Depardieu et Deneuve seront entendus par la justice sur les émoluments faramineux qu’ils auraient perçus pour frais de représentation.

Thune. Décidément insaisissable, le monstre sacré met en 2002 la main à la poche pour renflouer le PCF (comme Bayrou) et apparaît à la Fête de l’Huma. En 2007 et 2012, on connaît son soutien à Sarkozy, presque par défaut, «parce que les autres sont minables en face, on ne sait même pas de quel parti ils sont, ils sont plantés de partout, on s’en fout !» En somme, Depardieu se met toujours du côté de ceux qu’il considère comme des victimes de cabales, répétant à l’envi qu’il ne fait pas de politique, et encore plus du côté de ceux qui ont de la thune. Anar de droite ou de gauche, un glissement est vite arrivé.

On ne soupçonnera cependant pas son amour de la Russie d’être vénal, ni récent. L’acteur évoquait avant-hier un pays pudique où «chaque arbre, chaque paysage porte en nous un espoir». Et déjà, en 1998, se retrouvant devant un tribunal pour conduite en état d’ivresse, il plaidait en slave de cœur : «Je me suis comporté comme un moujik.» La russophilie a depuis gagné Brigitte Bardot, laquelle espère sauver les éléphantes du parc lyonnais de la Tête d’or en menaçant de faire comme Gégé. On a cru un instant que c’était à cause de l’avance bien connue de la médecine soviétique. Il s’agit en fait d’un odieux chantage : si on pique les pachydermes, elle s’en va.

Il n’y a que la sarkozyste Françoise Hardy qu’on n’entend plus, depuis qu’elle a râlé contre l’ISF avant de déménager. Françoise on t’aime, même si tu zézayes un peu sur ton dernier album.

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