« Lorrain » : différence entre les versions
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Le '''lorrain''', ou plus précisément le '''lorrain roman''', est une [[langue d'oïl]]. Ce terme désigne l'ensemble des [[dialecte]]s [[roman (langue)|romans]] de [[Lorraine]] qui sont par ailleurs devenus très peu usités au début du {{s-|XXI}}
Le lorrain déborde sur la [[
D'autre part, le lorrain roman se distingue du [[francique lorrain]], appellation utilisée depuis le {{s-|XX}} pour désigner les divers [[
== Classification Linguasphere ==
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L'observatoire linguistique [[Linguasphere]] distingue sept variantes du lorrain :
* argonnais ([[Argonne (région)|Argonne]], [[Woëvre]], est des [[Ardennes (département)|Ardennes]] françaises, [[Meuse (département)|Meuse]], [[Meurthe-et-Moselle]])
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* [[vosgien|spinalien]] ([[Épinal]], [[Vosges (département)|Vosges]] centrales)
* [[vosgien|déodatien]] ([[Saint-Dié]], Hautes-Vosges)
Après 1870, les membres de l'[[académie Stanislas]] de Nancy ont relevé 132 variantes de patois lorrain entre [[Thionville]] au nord et [[Rupt-sur-Moselle]] au sud, ce qui signifie que les variantes principales se déclinent en sous-variantes.
== Histoire ==
Sous l'[[Société d'Ancien Régime|ancien régime]], comme en Lorraine encore indépendante, l'enseignement était une affaire religieuse. Dès le début de {{
La [[Révolution française
L'abandon définitif du lorrain roman est principalement d'ordre économique et social. Le début de la deuxième moitié du {{
Georges Tronquart dans son ouvrage ''Trois patois de la colline inspirée'' donne quelques exemples de l'évolution de la langue régionale dans son village : « en 1890, les enfants de [[Saxon-Sion]] s'adressaient aux adultes en patois mais en 1900, ils répondaient aux adultes en français, y compris à ceux qui les interpellaient en patois ». « Les réunions du conseil municipal de [[Saxon-Sion]] se sont tenues en patois jusqu'en 1910 ». « Monsieur Thirion né et mort à [[Saxon-Sion]] n'a jamais prononcé un mot de français avant 1914 ; il n'a plus prononcé un mot de patois après 1918 ». En revanche, le même auteur s'étonne que les jeunes filles de [[Praye]] parlent patois entre elles en 1923.
La situation a évoluée de manière sensiblement différente dans le [[département de la Moselle]]. Son [[Traité de Francfort|annexion en 1871]] a provoqué un regain d'intérêt pour les deux langues locales. Bien que l'occupant ait interdit l'emploi de toute autre langue que l'[[allemand standard]] en territoires annexés, l'usage discret du patois était plus ou moins toléré alors que l'usage du français était sévèrement puni. Dans la biographie d'Hubert Vion, curé de [[Bazoncourt]] de 1869 à 1896 et auteur de plusieurs ouvrages sur le lorrain roman, on raconte qu'il eut l'audace d'adresser un compliment en patois roman à l'empereur [[Guillaume II (empereur allemand)|Guillaume II]] en visite dans la région. Ainsi, pendant que le lorrain roman subissait un très net et très rapide recul en Meurthe-et-Moselle, Meuse et dans les Vosges, il connaissait un certain regain en Moselle. C'est seulement à partir de 1945 que l'on cessa de le parler dans ce département.▼
▲La situation a
== Toponymie ==
Dans l'ancien Lorrain, le phonème obtenu avec la lettre
Dans les patronymes d'origine lorraine et dans les toponymes lorrains, la prononciation de la lettre
Autour de [[Charmes (Vosges)|Charmes]] et d'[[Épinal]], les toponymes avec <x> se prononçaient [s] jusqu'à la fin du {{s-|XX}} : [[Nomexy]] se prononçait ''Nome'si'', [[Vaubexy]] se prononçait ''Vaube'si'', [[Ubexy]] se prononçait ''Ube'si''.
L'évolution de la prononciation des noms que nous constatons au {{Siècle|XIX|}} et {{Siècle|XX|}} siècle n'est probablement pas un phénomène nouveau.Il faut avoir à l'esprit que ces prononciations sont celles d'une période historique donnée et qu'elle étaient probablement très différentes plus tôt dans l'histoire. ▼
▲L'évolution de la prononciation des noms
Quelques exemples de localités en lorrain roman du {{Siècle|XIX|}} siècle<ref>Ernest de Bouteiller, ''Dictionnaire topographique de l'ancien département de la Moselle, rédigé en 1868 sous les auspices de la Société d'archéologie et d'histoire de la Moselle'', Paris, Imprimerie nationale</ref>{{,}}<ref>Henri Lepage, ''Dictionnaire topographique du département de la Meurthe'', Paris, Imprimerie impériale, 1862</ref> : ''S'li en Sauneu'' ([[Silly-en-Saulnois]]), ''Aumanv'lé'' ([[Amanvillers]]), ''Auvlé'' ([[Avillers (Meurthe-et-Moselle)|Avillers]]), ''Circo'' ([[Xivry-Circourt|Circourt]]), ''Ronco'' ([[Roncourt (Moselle)|Roncourt]]), ''Ansrevelle'' ([[Ancerville (Moselle)|Ancerville]]), ''Fieuvelle'' ([[Fléville-Lixières|Fléville]]), ''Lech'ire'' ([[Fléville-Lixières|Lixières]]), ''Méch'ly'' ([[Marsilly (Moselle)|Marsilly]]), ''Ma-lai-tô'' ([[Mars-la-Tour]]), ''Mékieuf'' ([[Mécleuves]]), ''Bieu'' ([[Beux]]), ''Monteu'' ([[Montoy-Flanville|Montoy]]), ''Augondange''/''Agondanche'' ([[Hagondange]]), ''Souagsonche'' ([[Xouaxange]]), ''Chaméni'' ([[Xermaménil]]), ''Lovni'' ([[Louvigny (Moselle)|Louvigny]]), ''Coïni'' ([[Colligny]]), ''Ponteu'' ([[Pontoy]]), ''Pinaud'' ([[Épinal]]), ''Giromouè'' ([[Gérardmer]]), ''Rambièlè'' ([[Rambervillers]])'','' ''Nanceye'' ([[Nancy]]), Lâchou ([[Laxou]]), L'nainville ([[Lunéville]]), ''Tou''<sub>e</sub> ([[Toul]]), Sallebo ([[Sarrebourg]]), ''Ouëpy'' ([[Woippy]]), ''Virtang'' ([[Virton]]).▼
▲Quelques exemples de localités en lorrain roman du {{
On trouve de nombreux mots lorrains dans les noms de rues à [[Metz]] avec le pont ''Sailli'', les rues ''Wad-Billy'', de ''la Baue'', ''aux Ossons'', ''Paille-Maille'', ''Chambière'', ''Coffe Millet'', ''Taison'', ''de Saulnerie'', ''en Fournirue'', ''en Chandelerue''. À [[Nancy]] : ''porte de la Craffe, sentier de la Teulotte, rues de la Boudière, de la Foucotte, des Michottes, de la croix d'Auyot, de l'Atrie''. À [[Malzéville]], rues de l'''Embanie, du Salvon, du Chazeau''. À [[Laxou]], rue ''Com des Chicottes ;'' dans cette ville, le nom lorrain rue ''du Chaucheu'' a été traduit en rue du Pressoir. À [[Épinal]], place de ''l'Atre'', rues ''du Boudiou'', ''Vautrin'' (patronyme lorrain), ''du Saulcy'', ''des Béguinettes'', de ''la Maix''. À [[Gerbéviller]], rue de ''la Deuil''. À Moyen, rue de ''la Ouette charrière''. À [[Dombasle-sur-Meurthe]], rue de ''l'Embanie'', du ''Couaroil'', de ''Behard''.
== Déclamation ==
Le nombre de locuteurs étant très réduit en 2019, il est possible d'écouter la fable d’[[Ésope]], « ''
L'accent lorrain tend lui aussi à disparaître. Hormis quelques communes dans le Sud-Est de la Meurthe-et-Moselle et dans la campagne vosgienne, il n'est audible en 2019 que par des personnes très attentives. On peut cependant reconnaître certains lorrains qui, comme dans l'ancienne langue régionale, ont tendance à remplacer le pronom démonstratif par un adverbe enclitique. Exemple : ''l'objet
Les articles ''le'' et ''la'' qui étaient systématiquement placés devant les noms propres (par exemple : ''« le Jeannot », « la Marie »'') sont beaucoup moins fréquents mais n'ont pas disparu.
== Phonétique ==
Le phonème /x/ très caractéristique a été abordé dans le paragraphe Toponymie.
La lettre <h> des mots lorrains est nettement expirée comme dans l'Anglais ''Harvard''. On ne doit en aucun cas faire de liaison avec le mot précédent.
Les philologues ont longuement débattu à propos du [in] lorrain qui n'existe pas non plus en français. C'est un son nasillard situé entre [ie] et [inn]<ref name=":0">{{Ouvrage|langue=|auteur1=Lucien Adam|titre=les patois lorrains|passage=pages 62|lieu=25 quai Voltaire, Paris|éditeur=Maisonneuve et Cie|date=1881|pages totales=520|isbn=|lire en ligne=https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k295974?rk=21459;2}}</ref> que Lucien Adam rapproche du [in] latin de « ''in petto'' ». ▼
<Y> constitue un autre particularisme. Certains philologues n'hésitent pas à le qualifier de « ''consonne lorraine'' » puisqu'il s'entend toujours. [''Haye''], qui signifie haie, est un autre exemple phonétique avec [y]. Le mot se prononçait [''eille''] comme dans veille.
=== Voyelles lorraines === ▼
L'on s'est beaucoup moqué de l'accent lorrain avec ses [â], [ô] et [î] traînants et fortement accentués, souvent qualifiés de "paysannerie". En réalité, elle jouent dans la langue lorraine le rôle de l'[[accent tonique]] dans d'autres langues. Les [â], [ô] et [î] seraient plutôt à considérer comme des voyelles supplémentaires car les voyelles non accentuées telles qu'on les emploie en français sont parfaitement connues et fréquemment utilisées en lorrain ; exemple, les deux [a] de ''margatte'' (mot lorrain signifiant boue) se prononcent exactement comme en français. Il en est de même pour le [o] de ''godot'' (verre). En revanche, le [î] traînant de ''rîge'' (crible) et de ''nîge'' (neige) semble plus rare. ▼
Les philologues ont longuement débattu à propos du [in] lorrain qui n'existe pas non plus en français. Il est présent notamment dans [''roncin'']. C'est un son nasillard que Lucien Adam rapproche du [''in''] latin de « ''in petto'' » prononcé de telle sorte que l'on entend à peine l'[n] final.
▲L'on s'est beaucoup moqué de l'accent lorrain avec ses [â], [ô] et [î] traînants et fortement accentués, souvent qualifiés de
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Alors que le Larousse indique que le français moderne ne possède plus de diphtongue, Lucien Adam en recense plus de trente pour le lorrain mais cette remarque n'a plus guère de sens aujourd'hui puisqu'il n'y a plus assez de locuteurs pour faire entendre ces variations si compliquées.
== Grammaire ==
[[File:Carte Bounne Annaye Bounne Santé.jpg|thumb|Carte de vœux en lorrain de [[Meuse (département)|Meuse]] ([[Barrois]]) : ''Bounne Annaye, Bounne Santé'', écrit parfois ''Bounne Annaïe'' / ''Bounne Anneye''...]]
Si le lorrain n'a pas d'orthographe, il a une grammaire et elle est assez complexe. [[Léon Zéliqzon]] recense trois groupes de verbes ayant chacun des verbes irréguliers ainsi que des verbes forts et des verbes faibles. Les verbes pronominaux se conjuguent toujours avec l'auxiliaire avoir<ref name=":0" />.
Là où le français a gardé une grande partie des désinences verbales personnelles du latin (dans la langue écrite), la plupart des verbes lorrains se conjuguent avec seulement deux flexions : une pour le singulier et une pour le pluriel. Exemple de conjugaison à l'imparfait du verbe parler : « ''dje prakè, te prakè, è prakè, dje prakonne, vos prakonne, è prakonne'' »<ref name=":0" />.
=== Imparfait proche et imparfait lointain ===
Là où le français n'a qu'un imparfait, le lorrain a développé un système lui permettant d'exprimer une nuance dans cette temporalité par l'adjonction ou non de l'adverbe ''or'' (''or'' ou ''ores'' signifiait ''maintenant'' ou ''à l'instant'' en ancien français) après le verbe à l'imparfait. Le lorrain distingue en effet une action passée exprimée à l'imparfait proche dans le temps d'une située plus loin ou d'ordre plus générale. Par exemple, là où le français utilisera le même imparfait pour parler des ''nuages qui passaient dans le ciel hier'' de ceux qui ''passaient dans le ciel quand Louis XIV regardait la construction de Versailles'', le lorrain, lui, sera mesure d'exprimer ici cette nuance et de dire que ''les nuages passaient <u>or</u> dans le ciel hier'', cependant que d'autres ''passaient dans le ciel quand Louis XIV regardait <u>or</u> la construction de Versailles'' (les nuages passant désignent une action générale, passive et périphérique, tandis que le nœud de l'action proche est celle de Louis XIV regardant la construction de Versailles).
''J'étais or sorti du bus quand on me vola mon sac, et nul ne broncha de ceux qui étaient là !''
''Le chien aboyait or depuis plus d'une heure quand mon père lui ouvrit''
''Vous aviez plus de biens que vous n'en paraissiez or avoir''
À de rares exceptions près, le lorrain n'utilise pas d'adjectif déterminatif qu'il remplace par un article et un adverbe enclitique. Encore aujourd'hui en 2020 et en français, il n'est pas exceptionnel d'entendre un lorrain dire : « l'homme là » au lieu de « cet homme ».
Les adverbes de lieux sont toujours emphatiques : « ''to ci'' » et « ''to lè'' » pour [ici] et [là]. Sauf rares exceptions, il en est de même pour les pronoms interrogatifs.
Les noms communs ne subissent pas de modification, ou très rarement, en passant du singulier au pluriel.
== Dictionnaires lorrains ==
Le Lorrain roman a fait l'objet de nombreuses études, particulièrement de la fin du {{s-|XVIII}} jusqu'au début du {{s-|XX}}. Voici par ordre chronologique les principaux dictionnaires faisant
* 1775 : ''[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k63505943.texteImage Essai sur le patois lorrain des environs du comté du Ban de la Roche]'' par [[Jérémie-Jacques Oberlin]] ; * 1881 : ''[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k295974 * 1887 : ''Essai sur un patois vosgien'' par Nicolas Haillant ; * 1922-1924 : dictionnaire des patois romans de la Moselle par [[Léon Zéliqzon]]. Celui de Lucien Adam fut très critiqué lors de sa parution mais c'est surtout l'origine historique qu'il donne à la langue régionale qui fit débat. == Notes et références ==
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== Voir aussi ==
{{Autres projets|wikiversity=Département:Lorrain|wikiversity titre=Département de lorrain|wiktionary=lorrain}}▼
=== Bibliographie ===
* {{bibliographie|Q115124294}}
* ''Atlas linguistique et ethnographique de la Lorraine romane'', 4 vol., 1979-1988 {{OCLC|6764918}}
* Jean Lanher, ''Les [[Contes de Fraimbois]]'', 1991. Recueil de contes humoristiques en lorrain.
* Brondex & Mory,
* Georges L'Hôte,
* Mory, D., ''[http://ehrenfriedstoeber.tripod.com/chanheurlin.html Lo baitomme don piat fei de Chan Heurlin]'', Nouv. éd. par J. Th. Baron, Annuaire de la Société d'Histoire et d'Archéologie lorraine, Metz, XX, 1908, {{p.|121-151}}
* [[Léon Zéliqzon]],
* ''Patois de La Bresse'', in ''Bulletin de la Société philomatique vosgienne'', par Jean Hingre (1903-1924).
* Régis Watrinet, ''Patois romans de la Lorraine. Recueil d’expressions, proverbes, dictons, coutumes et traditions avec illustrations'', imprimerie Léon Louis, [[Boulay-Moselle|Boulay]], {{date-|septembre 2008}}.
* Henri Adolphe Labourasse, ''Glossaire abrégé du patois de la Meuse, notamment de celui des Vouthons'', 1887 ([https://books.google.fr/books?id=6l3HlXVrALoC voir en ligne])
* Varlet (abbé), ''Dictionnaire du patois meusien'', 1896
* D. Lorrain, ''Le parler Lorrain du Pays Messin, version augmentée de « Glossaire du Patois Messin »'', 2020, Editions JALON (https://editions-jalon.fr), 128 p., {{ISBN|978-2-491-06812-7}}.
=== Articles connexes ===
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=== Liens externes ===
▲{{Autres projets|wikiversity=Département:Lorrain}}
* {{Autorité}}
* [http://www.lexilogos.com/lorrain_langue_dictionnaires.htm Lexilogos : listes de liens, dictionnaires, textes]
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[[Catégorie:Langue
[[Catégorie:Langue
[[Catégorie:Gaume]]
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