Espèce disparue
En biologie et en écologie, une espèce disparue est une population réputée n’avoir plus aucun représentant vivant, ni dans la nature, ni en captivité. Avant l’apparition du clonage, on considérait que le moment de l’extinction correspondait à la mort du dernier individu de l’espèce.
Si les techniques de conservation de tissus ou de gamètes se perfectionnent, le clonage permettra peut-être de dupliquer le dernier individu connu d’une espèce végétale (ou quelques individus), mais non de retrouver la diversité génétique de l’espèce, et sans garantie que l’espèce puisse survivre dans la nature (par exemple si son pollinisateur spécialisé et/ou son habitat ont également disparu).
Depuis 1963, la liste rouge de l'UICN dresse la liste des espèces menacées ou disparues. En 1988, toutes les espèces connues d'oiseaux avaient été évaluées par l’UICN ainsi qu'en 1996, l’état de conservation de toutes les espèces de mammifères.
Parmi les 5 205 espèces décrites dans l'édition de 1996, 25 % des mammifères et 11 % des oiseaux étaient classées comme étant menacées. En 2006, l'UICN considère qu’une espèce de mammifères sur quatre, une espèce d’oiseaux sur huit, et un tiers des amphibiens sont menacés. Actuellement[Quand ?], une espèce animale ou végétale disparaît toutes les dix-sept minutes.
Situation actuelle
modifierLes paléontologues estiment qu’en temps normal, et à échelle géologique, la grande majorité des espèces « durent » de 1 à 10 millions d’années (5 millions en moyenne), avant soit de disparaître, soit de se modifier au point que l’on doive parler de nouvelles espèces.
La Terre a connu cinq extinctions majeures induites par des catastrophes géoclimatiques, la dernière étant celle qui a connu la disparition des grands dinosaures (une seule famille de ce groupe a survécu : les oiseaux).
Un nombre croissant de scientifiques et d’ONG craignent que l’humanité soit en train de provoquer une sixième extinction de masse, avec un rythme d’extinction qui semble encore plus rapide que lors des grandes crises naturelles précédentes.
À titre d’exemple[1] en « rythme normal », une espèce d’oiseau devrait disparaître par siècle, or c’est presque une espèce d’oiseau par an, cent fois plus, qui disparaît depuis le XXe siècle. Au début du XXIe siècle, cinq espèces de plantes vasculaires disparaissent chaque jour (une tous les deux ans, rien que pour la Picardie dans le nord de la France (source : Conservatoire botanique de Bailleul), contre une tous les 25 ans dans le monde en temps normal.
Plus de 260 vertébrés auraient récemment disparu (au XXe siècle), alors que pour un nombre estimé à 50 000 espèces de vertébrés, c’est une disparition par siècle qui devrait se produire. L’estimation des disparitions actuelles est probablement sous-estimée, en raison d’un grand nombre de petits invertébrés inconnus ou non suivis.
Données relatives
modifierPour les espèces récemment disparues (totalement, ou seulement dans leur milieu d’origine en cas de survie en captivité), et notamment dans les régions reculées ou peu prospectées par les biologistes, la notion de « disparu » est à considérer comme une probabilité élevée[2]. Cela est rare, mais il arrive parfois que l’on retrouve un ou quelques individus d’une espèce que l’on croyait disparue : ainsi une tortue aquatique, Rafetus swinhoei pouvant atteindre 1 m de long pour 140 kg, que l’on considérait comme éteinte dans la nature (seuls trois individus étaient connus en captivité) a récemment été observée à l’état sauvage sur les rives d’un lac du nord du Vietnam[3]. Cette espèce reste bien sûr classée comme la plus menacée au monde parmi les tortues d’eau douce.
Peut-on et doit-on remplacer certaines espèces disparues ?
modifierC’est une question scientifique à la fois éthique et pratique, qui ne fait pas l’objet de consensus, mais qui est étudiée. Sur le plan éthique, laisser faire des pratiques prédatrices et des gouvernances à courte vue, c'est nier non seulement le droit des autres espèces à exister[4], mais aussi le droit des générations humaines futures à bénéficier des mêmes ressources et « services-rendus par la biosphère » que les générations actuelles[5]. Sur le plan pratique, certaines espèces « récemment » disparues (grands herbivores, grands carnivores) jouaient en effet des rôles fonctionnels et écopaysagers qui ne peuvent être remplacés par l’homme ou d’autres animaux plus petits.
Certaines, comme le Sophora toromiro de l’île de Pâques, y ont été réintroduits à partir de graines et plants conservés dans les carpothèques et jardins botaniques du monde.
Des scientifiques étudient si d’autres espèces proches et adaptées aux mêmes milieux et climats pourraient les « remplacer ». Ils envisagent des expérimentations (en milieu confiné) par exemple d’introduction du lion ou de l’éléphant africain en Amérique du Nord pour respectivement « remplacer » le lion des cavernes et les espèces de mammouths qui n’ont pas survécu à l’occupation préhistorique[6].
Notes et références
modifier- Source : émission de France culture du vendredi 2 mars 2007 intitulée « Vivons-nous une extinction massive des espèces ? », avec Sébastien Moncorps, directeur du Comité français de l’UICN
- (en) Tim Lindken, Christopher V. Anderson, Daniel Ariano‐Sánchez et Goni Barki, « What factors influence the rediscovery of lost tetrapod species? », Global Change Biology, vol. 30, no 1, (ISSN 1354-1013 et 1365-2486, DOI 10.1111/gcb.17107, lire en ligne, consulté le )
- Brève de Mélanie Bourdon, Sciences et Avenir, 18/04/2008
- J. Delord, L'extinction d'espèce: histoire d'un concept & enjeux éthiques, Paris 2002, Publications scientifiques du Muséum national d'Histoire naturelle, 691 p. (coll. Archives 14) (ISBN 978-2-85653-656-8).
- Évaluer la biodiversité et les services écosystémiques : pour quoi faire ?, Document de recherche CNRS, UMR 5474 LAMETA, DR n°2010-17
- Article de Pour la Science intitulé Le retour des éléphants et des lions en Amérique (« Pour la Science » n° 368, Juin 2008, édition française de « Scientific American »), à propos de l'idée de réintroduire les animaux qui ont disparu de l'Amérique du Nord il y a 13 000 ans ? pour une nouvelle gestion restauratoire et biologie de la conservation