BIBI OU MA CARRIÈRE BACHIQUE
chansonnette épicurienne
Air : Gaiment je m’accommode de tout.
(Le Bouffe et le Tailleur.)
Quoiqu’un docteur censure
Vinum,
Il est, je vous assure,
Bonum ;
Et comme chacun pense
Sibi,
Dès ma plus tendre enfance
Bibi.
Je vis sur mon passage
Aquam ;
Mais pour en faire usage
Nunquam :
Je vis du vin à boire
Tibi,
Tibi, mon cher Grégoire,
Bibi.
Je fus près des bourriches
Lœtus,
Et prés de certains riches
Mutus ;
Mais toujours sous les treilles
Ubi
Je trouvai des bouteilles
Bibi.
Paris fut mon asile…
Erit ;
Et si quelque imbécile
Quœrit :
« Dis-moi, pour être utile
« Urbi,
« Que fis-tu dans la ville ?… »
Bibi.
Si j’ai craint les batailles
Multum,
J’ai fait voir aux futailles
Vultum ;
Moins fatal qu’Alexandre
Orbi,
Sans rien réduire en cendre,
Bibi.
Jadis, fêtant sans cesse
Bacchum,
J’enivrais ma maîtresse
Mecum :
Resté seul, j’eus des craintes
Morbi ;
Pour braver ses atteintes,
Bibi.
Je fis parfois à table
Carmen
Non pour rendre durable
Nomen,
J’ignorai l’art sublime
Phœbi ;
Pour rencontrer la rime
Bibi.
Par Bacchus je respire,
Bibo,
Et lorsqu’au sombre empire
Ibo,
Narguant la soif fatale
Ibi,
Je veux dire à Tantale :
Bibi.
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Armand Gouffé.