Romanticism and Mythology in Savoyan Literature. From Xavier de Maistre to Maurice Dantand (1794-1914)
Romantisme et mythologie dans la littérature savoisienne. De Xavier de Maistre à Maurice Dantand (1794-1914)
Résumé
The Sardinian restoration, in 1815, aroused a literature that was first devoted to the Savoyan dynasty and which tried to restore its sacredness. As a matter of fact, this situation moved towards the emergence of a mythology whose nature may be questioned. Was this mythology a pure convention or was it based on deeper soul foundations ?The objective conditions of the Savoyan cultural life at the time are known to have shown a constant research for identity in the feudal past. In Savoy, contrary to what happened in France, at first the legacy of the French Revolution was rejected in order to return to the old state of mind. The Academy of Savoy was created in this impetus of cultural restoration, opening widely to a poetry, which would also revive the marvelous medieval. Education, on the other hand, was rendered entirely to the bishops who were anxious to instruct the people in a religious sense. However, despite the romantic personality of Charles Albert, this trend finally collapsed under the pressure of social evolution. Nevertheless, Savoy remained a deeply Catholic region in a remarkable way until the beginning of the 1900s, taking advantage of the arrangements of the Annexation Treaty to preserve its own prerogatives. As its taste for the marvelous focused on local traditions, for a long time Savoy succeeded in keeping ts specificity and rich, shimmering imaginations.In this field, it obtained its inspiration on a literary tradition which was already rich before 1792 and dominated by the work of Francis de Sales. It was also marked by dynastic chronicles and court, or even patriotic, poetry, which appeared in the Renaissance period. Mixing baroque art with the worship of princes and local saints, it brought out the outline of a new mythology from the sixteenth to seventeenth century. Furthermore, Rousseau influenced those who felt nostalgia for an idealized Savoy, perceived as closer to deity than the great cities of the French plains.The landscape was transfigured by a bourgeoning romantic poetry and individuals saw themselves as a summary of the religious history of humanity. As a consequence, the hero became closer to humanity, without losing his links with the deity. The supernatural creatures of the marvelous, pagan or Christian, popular or learned, were also provided with life, connecting themselves with mountains, lakes, princes, people and with all other ordinary realities experienced by the authors. Instead of remaining in abstract and conventional worlds , these creatures inregrated the local life, becoming the expression of a national genius conceived as a secret soul of the Savoyan land, which could even have a thought by itself. Hereafter natural phenomena were regarded as inhabited by divine wisdom, and considered in their overall harmony allowing the existence of an intermediate world situated between the physical world and the divine world and where Providence could communicate and act by itself. A sort of romantic science, similar to the German one, started to develop trying ti test the aims of divinity in the present not only for humanity, as a group, in Europe, but also for the individual, whose own enigmas were touched. This is how a real mythology, alive and moving, emerged in Savoy.Faced with the richness of this inspiration, we may wonder why today these works are disregarded by critics. Among the answers that could explain the situation we may point out the inadequacy of the Savoyan tradition, marked by Italy and Germany, to the standards of French University.
La restauration sarde de 1815 a créé une littérature qui, d'abord dévouée à la dynastie savoisienne, cherchait à en rétablir le caractère sacré. Cela a tendu à forger une mythologie, dont la question est de savoir si elle est de pure convention, ou si elle a un fondement plus profond dans le sentiment individuel.Les conditions objectives de la vie culturelle de la Savoie d'alors manifestent une constante recherche d'identité dans le passé féodal. Contrairement à ce qui s'est produit en France, on a, un temps, renoncé complètement à l'héritage de la Révolution, pour revenir à l'ancien état d'esprit. L'Académie de Savoie fut créée dans cette dynamique et, en instaurant un prix de poésie, elle participa à la restauration du merveilleux médiéval. L'éducation était, de son côté, rendue à des évêques soucieux d'instruire le peuple dans un sens religieux. Cependant, malgré le tempérament romantique de Charles-Albert, l'édifice va se fissurer, sous les poussées de l'évolution sociale.La Savoie est restée une région profondément catholique jusqu'au début des années 1900 (bénéficiant, un temps, des dispositions issues du traité d'Annexion pour conserver à son clergé ses prérogatives propres) ; son goût pour le merveilleux se déplaçant vers les traditions locales, elle a longtemps entretenu un imaginaire spécifique et chatoyant. Elle puisait, à cet égard, dans une tradition littéraire déjà riche avant 1792, dominée par l'œuvre de François de Sales, mais marquée également par les chroniques dynastiques et la poésie de cour ou plus généralement patriotique, apparue dès la Renaissance. Mêlant l'art baroque et le culte des princes et des saints locaux, elle fait apparaître l'ébauche d'une mythologie dès les XVIe-XVIIe siècles. L'influence de Rousseau, également, se fera sentir sur les nostalgiques d'une Savoie idéalisée, pensée plus proche de la divinité que ne le sont les villes des plaines françaises.Le paysage est transfiguré par la poésie romantique naissante et l'individu se regarde comme un résumé de l'histoire religieuse de l'humanité. Le héros en devient, par contrecoup, plus imprégné d'humanité, sans perdre pour autant son lien avec la divinité. Les créatures surnaturelles du merveilleux païen ou chrétien, populaire ou érudit, sont également irriguées de vie propre, se reliant aux montagnes, aux lacs, aux princes, au peuple, aux réalités ordinaires vécues par les auteurs. Loin d'être laissés dans des sphères abstraites, toutes de convention, elles s'insèrent dans la vie locale et semblent être l'expression d'un génie national conçu comme une vie secrète de la terre savoisienne, à laquelle il manque peu de chose pour être une âme pensante à part entière. De fait, les phénomènes naturels eux-mêmes sont regardés comme habités par la sagesse divine, et considérés dans leur harmonie globale ; on établit l'existence d'une sphère intermédiaire, située entre le monde physique et le monde divin, dans laquelle la Providence peut précisément se manifester et s'exercer. Une forme de science romantique, sur le modèle allemand, se développe donc. Mieux encore, on tente de sonder les desseins de la divinité dans l'histoire présente, pour l'humanité prise collectivement, pour l'Europe, mais aussi pour l'individu, dont les énigmes propres sont effleurées. Ainsi s'est créée une vraie mythologie, vivante et mouvante, en Savoie.Face à la richesse de cette inspiration qui n'est convenue qu'en apparence, la question se pose de savoir pourquoi les œuvres en sont aujourd'hui négligées par la critique. Des pistes sont proposées, parmi lesquelles l'inadéquation de la tradition savoyarde, marquée par l'Italie et l'Allemagne, aux catégories de l'Université française.
Origine | Version validée par le jury (STAR) |
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