Agnès DUBREIL-ARCIN*

UN HAGIOGRAPHE À L'ŒUVRE :

BERNARD GUI ET LES LÉGENDES

DE SAINT SATURNIN DE TOULOUSE

La grande basilique de Toulouse a une double dédicace, à saint Saturnin et au Saint Esprit. Pour l'opinion commune cependant, elle ne porte que le nom du saint le plus important de la ville, Saturnin, dont l'histoire est relativement bien documentée. C'est la Passio sancti Saturnini, composée au milieu du Ve siècle, qui mentionne sobrement la présence de Saturnin à Toulouse vers 2501. Cette passion, authentique, tient lieu d'acte officiel du premier martyr et fonde les historiens à s'entendre sur le milieu du HP siècle comme date de l'apostolat de Saturnin.

À la suite de la rédaction de ces actes, la légende de ce saint se constitue À partir du VIe siècle, une série de textes hagiographiques cherche à préciser les origines du saint et à fournir aux fidèles des détails propres à le culte du martyr. C'est par exemple un Césaire d'Arles (t 542) qui, dans son traité De mysterio santae Trinitatis, place Saturnin aux côtés de Trophime, « disciple des apôtres ». À sa suite, Grégoire de Tours, dans le Liber in Gloria martyrum, fait de Saturnin un disciple des apôtres {ab apostolorum discipulis ordinatus) ainsi qu'un membre de la mission des sept évêques évangélisateurs de la Gaule. A partir du VIe siècle donc, et au mépris des actes authentiques, les légendes remontent de quelque deux cents années l'apostolat de Saturnin et du même coup des évangélisateurs supposés de la région, comme Martial de Limoges. C'est le point de départ d'une multitude de développements et de la prolifération de récits fabuleux.

Au cours d'une carrière ecclésiastique riche en productions littéraires, Bernard Gui (1260 ou 1261-1331) eut quatre occasions d'écrire sur Saturnin, premier évêque de Toulouse martyrisé au milieu du ?? siècle. Sans doute au début de l'année 1313, alors qu'il est définiteur pour le chapitre provincial à