(Ottawa) Le Canada n’est pas prêt à emboîter le pas à l’Espagne, l’Irlande et la Norvège, qui reconnaîtront l’État palestinien : cette étape sera franchie « au moment opportun », a déclaré mercredi Justin Trudeau.
L’annonce du trio de pays européens a fourni au Nouveau Parti démocratique (NPD) une occasion de revenir à la charge sur cette question.
« Il s’agit d’une étape cruciale vers la paix et la justice pour les Palestiniens et les Israéliens, mais le Canada est aux abonnés absents […] Le premier ministre peut prendre position aujourd’hui. Va-t-il […] reconnaître l’État de la Palestine ? », a demandé la néo-démocrate Heather McPherson lors de la période des questions.
Se référant à des notes écrites, Justin Trudeau lui a répondu que le Canada n’était pas prêt à se joindre à ces trois pays européens. « Nous nous opposons aux efforts du gouvernement Nétanyahou de rejeter une solution à deux États », a-t-il précisé en parlant d’un gouvernement avec qui les relations sont tendues.
« Nous sommes prêts à reconnaître l’État de Palestine au moment opportun, pas nécessairement comme une dernière étape dans le chemin [vers la paix] », a-t-il ajouté, notant que le Hamas contrôlait actuellement des secteurs de la bande de Gaza et n’avait pas déposé ses armes ni libéré les otages israéliens.
Le Canada avait déjà offert ces arguments lorsqu’il s’était abstenu de voter sur une résolution concernant cet enjeu à l’Assemblée générale des Nations unies, le 10 mai dernier.Ottawa était des 25 pays abstentionnistes. La résolution avait été adoptée par 143 voix pour, 9 voix contre (Argentine, États-Unis, Hongrie, Israël, Micronésie, Nauru, Palaos, Papouasie-Nouvelle-Guinée et République tchèque).
L’Espagne, l’Irlande et la Norvège ont annoncé mercredi qu’ils reconnaîtraient l’État palestinien, ce qui n’a pas manqué de provoquer la fureur d’Israël.
Il s’agit d’un deuxième camouflet de la communauté internationale à l’endroit de l’État hébreu en l’espace de quelques jours, la Cour pénale internationale (CPI) ayant demandé lundi des mandats d’arrêt contre le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et son ministre de la Défense, Yoav Gallant.
Tout en reconnaissant l’indépendance du tribunal international, le premier ministre Trudeau a dit qu’il trouvait « vraiment problématique qu’il y ait suggestion d’équivalence entre le leadership élu d’un pays démocratique comme Israël et les leaders du groupe terroriste meurtrier Hamas ».
Au Parti conservateur, l’annonce de la CPI a suscité l’indignation. « La demande du procureur général de la CPI d’arrêter les dirigeants démocratiquement élus d’Israël pour avoir défendu leur pays contre le terrorisme est scandaleuse », a dénoncé le député Michael Chong dans une déclaration publiée sur le réseau X.
Une tentative renouvelée
Le NPD avait tenté d’amener le gouvernement Trudeau à franchir cette étape par l’entremise d’une motion. À l’issue de négociations serrées avec les libéraux, la disposition sur la reconnaissance de l’État palestinien était toutefois passée à la trappe lors du vote, en mars dernier.
La démarche néo-démocrate était surtout embêtante pour les libéraux. Dans les autres camps, les positions étaient clairement délimitées, à tout le moins publiquement. Conservateurs : non. Néo-démocrates, bloquistes et verts : oui.